mercredi 5 janvier 2011

les profs, tous autant qu'ils sont... (fragment non daté, 2005)

Les profs, tous autant qu’ils sont : une bande d’enculés. Les petits, les grands, les femelles, les mâles, les barbus, les moustachus, les moustachues, les maniérés, les excitées, les mous, les insistants, leurs assistants, les vicieux, les de sport, les toujours malades, les remplaçants, les plaisantins, les gentils, les méchants, les morts, les vivants, les moit-moit’, les mains moites, ceux de la petite école, ceux de la grande école, ceux à grandes oreilles, ceux à petits yeux, ceux qui puent l’eau de cologne, ceux qui puent le collège, ceux que la terre a porté, porte, portera ; une bande d’enculés. Un ramassis de tordus et de tordues, de fieffés emmerdeurs empêcheurs de vivre sa vie. Des crétins qui ne comprennent rien à rien derrière leurs lunettes, toujours en grève même le dimanche ; un nid de parasites. Oui, de parasites, le prof c’est comme le pou, c’est un parasite qui se colle essentiellement aux gosses. Il faut des années et des années pour s’en débarrasser. Seule solution, en attendant : s’y habituer. Pas facile facile. Mais de toute façon, on n’a pas le choix : le prof n’est qu’un des représentants - certes l’un des plus agressifs, mais pas le seul - d’une espèce fondamentalement nuisible avec laquelle j’ai du me résoudre à cohabiter : l’adulte. Qui n’est lui même qu’une sous-espèce de cet ennemi viscéral, héréditaire : l’autre. Les gens qui ne sont pas moi. Autrui est un con. De même qu’il ne faut pas donner de confiture aux cochons, il ne faut rien donner à autrui. Les négociations sont et seront permanentes mais sans espoir. Heureusement que quand je ferme les yeux vous n’existez plus.

Enfin bon, ceci dit, les profs, c’est quand même les pires. Surtout ceux qui vous veulent du bien et croient nécessaire de limer vos petites ailes d’enfant à coup de stylo rouge, parce qu’ils savent mieux ce qui est bon pour vous et ce qu’il faut faire et ce qui est juste ; « juste » alors qu’ils devraient dire « correct », mais dans leur tête trop pleine ils croient vraiment rendre la justice - leur justice je la vomis.

Vous me trouvez dure ? Laissez moi vous parler de ma connasse de prof de français en sixième. Avant ça se passait plutôt bien, j’étais même tombée amoureuse de Monsieur Farge, mon instit de CE1, parce qu’il avait toujours de jolies chaussures. Mais en sixième, soudain... Madame F. (je ne gâcherai pas d’autres lettres à écrire son nom de pute en entier ). Gentille, persuadée (et elle avait pas tort) que j’étais une élève douée. Et du coup, toujours prête à traquer la fantaisie pour me remettre les pieds sur terre dans le droit chemin des rails. Madame F. n’aimait pas Harry Potter ni la science-fiction, elle voulait que je lise de la vraie littérature, parce que paraît-il moi j’en étais capable. Quelle horreur. Elle n’aimait pas non plus mes expressions audacieuses. D’accord, j’étais peut-être un petit peu trop audacieuse, mais elle aurait du m’encourager, pas essayer de me ficeler la langue et le stylo. Cette salope me reprochait dans chaque rédaction ce dont j’étais le plus fière. Systématiquement. Une fois il fallait décrire ou imaginer une histoire à partir d’une photo, un genre de potier crado du tiers-monde en train de fabriquer un vase à la con. J’avais écrit : « le noble et habile potier fabrique un vase à partir de la terre vile ». Et l’autre conne qui me souligne « noble » et « vile » en rouge et demande dans la marge : « pourquoi noble ? pourquoi vile ? ». Parce que, connasse, parce que j’avais envie. Une autre fois, il fallait inventer une histoire où on devait ranger sa chambre (quelle passionnance !). J’avais mis sur le même plan l’état de ma piaule (catastrophique) et les catastrophes (naturelles) qui frappent la pauvre humanité, qu’a décidément pas de chance. Ca me permettait de caser un nouveau mot que j’avais découvert, dans la phrase suivante : « je me suis décidée à la ranger, dans un généreux élan d’altruisme ». Vous avez saisi l’astuce, non ? Chambre pas rangée = catastrophe, donc ranger chambre = réparer catastrophe, venir en aide à l’humanité, tout ça. D’où « altruisme ». Oui d’accord, c’était tiré par les cheveux, mais ça reste quand même compréhensible, non ?

Faut croire que non, l’autre conne elle me barre altruisme d’une grosse croix rouge, et à côté elle me marge « ça ne veut rien dire ». Mais si, connasse, ça voulait dire quelque chose. J’y peux rien si tu comprenais pas mon humour. C’est ce jour là que j’ai fait une grosse croix rouge sur elle, et toute sa profession. Une croix qui voulait dire qu’à partir de là je garderais pour moi toute idée ne cadrant pas avec leurs petites attentes bornées de fonctionnaires étroits du cul, de la bouche, des oreilles et du cerveau. Que je ne donnerai plus que le minimum de mon sang à ces vampires, juste ce qu’il faut pour être laissée tranquille dans mon coin. Le plus bêtement, le plus scolairement possible ; un vrai petit mouton poli qui ne sort jamais du passage piéton.

C’est tellement facile. Deviner ce que veut un prof, c’est pas plus dur que deviner si Navarro va attraper les méchants à la fin de l’épisode. Ca m’a garanti un maximum de bonnes notes avec un minimum d’efforts ; pas de déceptions ; et un bulletin pas loin de la tip-top perfection, ce qui est un excellent passeport pour ne pas se faire emmerder par les rampas (en excluant du système les profs de langues mortes - latin, de langues mortelles - allemand, et les profs de gym, qui sont décidément pas comme les autres, mais même dans ces matières maudites j’ai toujours réussi à sauver les meubles). L’essentiel, c’est de ne jamais finir par croire à toute cette merde. Ca tombe bien, je ne crois même pas ce que je vois.
Mais même comme ça, même en faisant tout ce qu’ils veulent, même en leur baisant les pieds, les profs sont quand même une belle brochette d’enculés qui réussissent toujours à faire chier. A vraiment faire chier vraiment chiément. La preuve ce matin en anglais : la salope me rend une putain d’évaluation de grammaire, et elle m’a enlevé un point, UN POINT, « pour la présentation » ; avec un hochement de tête et un air désolé et elle me dit que vraiment, faudrait que je soigne mon écriture, parce que j’écrirais plutôt mal, genre illisible. Et que sans ça j’aurais eu 20 et pas 19. Je vais te le faire bouffer ton air désolé moi, je suis sûre que t’es pas désolée du tout, c’est juste que tu voulais pas me mettre vingt parce que ça te fait mal à tes fesses de mettre la note maximum. Alors que j’ai tout fait nickel, c’était fucking facile - avec les demeurés qui squattent la classe, faut bien qu’elle adapte le niveau des exos, la vieille peau. Mais moi je le méritais, ce putain de vingt sur vingt, motherfucker de ta dirty race. Voilà, ça y est, ça m’a foutu les nerfs pour la matinée. Et l’autre qui continue à rendre ses copies en faisant des commentaires de merde, comme si de rien n’était...

C’est le moment que choisit mon abruti de voisin bavard pour se pencher vers moi et me dire que, putain, dix-neuf, je suis super forte, parce que lui même en pompant sur moi il a eu un pauvre onze. Je le regarde avec des glaçons ; lui réponds que c’est pas moi qui suis super forte mais lui qui est super nul, comme tous les autres connards de ce lycée de merde. Au lieu de s’énerver, ce qui était le but, il le prend avec philosophie. Son « carrément » me donne envie de lui mettre un ou deux poings dans la gueule, histoire de voir si ça le fera réagir, ça, ce pauvre bouffon sans fierté. Mais à quoi bon. S’il se satisfait de sa merditude, tant mieux pour lui.

Mes yeux bloquent sur la copie. C’est vrai que j’écris pas terriblement bien, que je rature, que je tâchedencre. Je devrais dire que c’est de l’art, peut-être que ça passerait mieux ? Mais madame vous ne comprenez pas que ça vaudra des millions, un jour, ça ? Vous devriez être fière d’avoir été la première à le voir terminé.

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